Retour au sommaire des oeuvres
 
 

Flavia Veneria Bessa

Texte, c.1991.

Flavia Veneria Bessa

Solidaire de la mort, elle porte dans ses bras une chauve-souris brûlée par le soleil. De sa robe déchirée, des serpents regardent le monde pour elle, et roulent jusqu’à son oreille, d’étranges passions où l’ombre et la lumière s’affrontent et se fanent.

Ses migrations légendaires parlent d’un arrière-pays de cendres et de neiges confondues, comme un linceul ignoré par la mort.

Fille des royaumes inachevés, elle hante d’interminables palais enfouis sous la rosée foudroyée d’une aube sans cesse reportée, et chante la peur dans les détonations du marbre et le fracas d’une mousse naissante.

Spectre de la buée hurlant au fond des miroirs, le monde à son appel revient en lisière, et cherche sur son corps les anciens territoires, où rugissent les abîmes, où se déchire l’horizon.

Mais les bûchers résonnent encore dans sa mémoire, et tendent entre ses mots les décombres d’un soleil mort d’avoir trop aimé la nuit.

Elle court sans pitié et sans rêve au bord des océans, et déploie, sous l’oeil incandescent des loups qui composent son ombre, les ténébreuses bannières de la désolation.

Reine des tourments et des défis dont les seules audiences se donnent à l’intérieur des volcans, elle traverse les villes comme une blessure sans fin, abreuvant d’un sang noir le fantôme de la vie.

Regardons là une dernière fois, palpitante et rougeoyante telle une langue coupée par le tranchant de l’angoisse, amorce d’une légende sans origine, dont elle serait la gardienne et la prisonnière, et que nous lisons dans les entrailles de notre vie.
 

 Christian Hibon

© 2025 Christian Hibon